Tanzanie : le rêve démocratique brisé de Samia Suluhu Hassan

De l’espoir d’une ouverture politique à la consolidation d’un pouvoir autoritaire, la présidente tanzanienne tourne le dos aux promesses de liberté qui avaient marqué son arrivée au pouvoir.

Arborant ses célèbres lunettes fumées et une ton solennelle, Samia Suluhu Hassan a prêté serment lundi pour un deuxième mandat à la tête de la Tanzanie. Celle qui incarnait, en 2021, l’espoir d’un renouveau démocratique pour son pays, est aujourd’hui accusée d’avoir fait taire toute dissidence.

La cérémonie d’investiture, tenue à huis clos, a réuni un parterre de militaires et de dignitaires. Devant eux, la cheffe de l’État a prôné « l’unité et la solidarité », tout en ignorant la contestation qui enflamme les rues depuis plusieurs jours. Des manifestations inédites, réprimées dans le sang, auraient provoqué la mort de plusieurs centaines de personnes selon les témoins locaux.

Une victoire écrasante… et suspecte

D’après la Commission électorale nationale, Samia Suluhu Hassan, 65 ans, a remporté près de 98 % des suffrages avec un taux de participation de 87 %. Des chiffres jugés « peu crédibles » par de nombreux observateurs.
Pour Dan Paget , politologue à l’université du Sussex, ces résultats traduisent avant tout « la volonté du régime d’envoyer un message : n’essayez pas de résister, nous avançons en plein jour ».

Les deux principaux candidats de l’opposition n’ont pas pu se présenter : l’un a été emprisonné, l’autre disqualifié. Un contexte qui confère à cette victoire un parfum d’autoritarisme assumé.

De l’espoir à la désillusion

Lorsque Samia Suluhu Hassan avait succédé à John Magufuli en 2021, elle avait promis une ère d’apaisement et de liberté. Première femme à diriger la Tanzanie, elle incarnait alors un symbole d’émancipation et de modernité.
Mais quatre ans plus tard, la réalité politique s’est durcie : arrestations arbitraires, musulmanement des médias et interdiction de manifestations publiques. Le pays, autrefois porteur d’espoir, semble désormais s’enfoncer dans la peur.

Une présidente sous pression internationale

Les organisations de défense des droits humains tirent la sonnette d’alarme. Amnesty International et Human Rights Watch dénoncent un « retour à la répression systématique ». L’Union africaine, quant à elle, observe avec embarras la dérive autoritaire d’un pays longtemps cité en exemple pour sa stabilité.

Devenue le visage d’une promesse démocratique trahie, Samia Suluhu Hassan illustre la fragilité des transitions politiques en Afrique de l’Est. Son deuxième mandat commence sous un nuage de sang et de silence, et pour beaucoup de Tanzaniens, l’espérance née en 2021 appartient déjà au passé.

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