Dérangés par le succès marocain, les agriculteurs espagnols manifestent leur mécontentement

Dérangés par le succès marocain, les agriculteurs espagnols manifestent leur mécontentement
Les importations de fruits et légumes marocains vers l’Espagne enregistrent une progression spectaculaire, suscitant la colère des producteurs espagnols confrontés à une concurrence jugée déloyale. Tomates, poivrons, avocats… Ces produits marocains inondent désormais les marchés ibériques, bouleversant l’équilibre économique d’un secteur déjà sous pression.
Selon les données récentes, le volume des fruits et légumes marocains importés en Espagne a atteint 191.906 tonnes au premier trimestre 2025, marquant une hausse de 22 % par rapport à l’année précédente. Cette dynamique s’accompagne d’une facture qui s’élève à 487,12 millions d’euros, contre 397,66 millions un an plus tôt, illustrant un écart de compétitivité croissant entre les producteurs marocains et espagnols.
Parmi les produits phares, la tomate affiche une hausse notable avec 32.313 tonnes exportées (+34 %), générant des revenus de 52,5 millions d’euros, soit une progression de 57 %. D’autres segments confirment cette tendance : poivrons (32.045 tonnes), haricots verts (19.600 tonnes) et surtout l’avocat, dont les exportations vers l’Espagne ont triplé en un an pour atteindre 29.159 tonnes, redéfinissant le paysage des importations de fruits à haute valeur ajoutée en Europe.
Les myrtilles suivent cette trajectoire ascendante avec 16.502 tonnes importées, grignotant progressivement les parts de marché des producteurs locaux espagnols.
Face à cette situation, la Fédération espagnole des producteurs et exportateurs de fruits et légumes (FEPEX) dénonce des conditions de concurrence inégales. Elle pointe du doigt le différentiel normatif entre l’Union européenne et les pays tiers, accusant le Maroc de bénéficier de standards environnementaux et sociaux moins contraignants, générant ainsi une forme de dumping qui fragilise la compétitivité des producteurs locaux. FEPEX plaide pour une révision de l’accord d’association UE-Maroc et l’instauration de « clauses miroir » afin d’aligner les règles de production.
Cette crise révèle également les défis structurels auxquels l’agriculture espagnole est confrontée : marges compressées, volatilité des prix, exigences réglementaires strictes et montée en puissance de concurrents externes. Pour y faire face, les producteurs espagnols réclament une régulation renforcée des flux commerciaux tout en soulignant la nécessité d’une montée en gamme et d’une différenciation de leur offre.
Côté marocain, ce dynamisme à l’export suscite un débat interne, certains acteurs pointant le risque de tension sur le marché local, où les prix des fruits et légumes connaissent des hausses qui pèsent sur le consommateur marocain.
Alors que les tensions commerciales se cristallisent entre les deux rives de la Méditerranée, la question de l’équilibre entre compétitivité à l’export et sécurité alimentaire locale s’impose comme un enjeu majeur pour le Maroc dans la poursuite de sa stratégie agricole.